Sunday, 23 June 2019

La Mémoire des Trichot

La mémoire des TRICHOT

                                    

 Huguette 1948



Paulo 1948

Huguette AUDOUY née TRICHOT décide un beau matin du 19 janvier 2004, à l’âge de 77 ans, à vous conter ses souvenirs familiaux.





1800
François TRICHOT né en 1800 à Barjac était cafetier en 1856 dans cette même ville de Barjac dans le Gard et vivait avec sa femme Marie VIGNON. 
Mon grand-père Prosper Léopold TRICHOT est né le 16 février 1856 à Barjac alors que son père avait 56 ans et sa mère 40 ; il était sûrement le dernier des enfants car mon père Henri parlait toujours de ses oncles partis en Amérique du Sud.
Mais revenons à François Trichot cafetier à Barjac et Maire du pays et parlons politique ou plutôt d’Histoire de France.

Les déportés politiques
Napoléon III fut le premier Président de la 2èmeRépublique et après avoir fait un coup d’Etat, est devenu l’Empereur Napoléon III en décembre 1852.
François Trichot était Républicain mais contre les valeurs de Napoléon III. Il s’était fait remarquer en tant que Maire contre le régime de l’Empereur. 
Il fut donc déporté politique avec sa femme et ses enfants vers 1860 où on l’a dirigé vers Sétif. On leur attribuait des terres à cultiver (2 hectares à rembourser sur leurs prochaines récoltes). C’est ainsi qu’un village entier fut créé par les déportés comme SILLEGUE à 10-15 Km de St ARNAUD. François Trichot et sa famille obtenu « sa propriété » à défendre et à faire prospérer à Sillègue et il ouvrit à nouveau un café que plus tard son fils, Léopold reprit à son compte.
Une anecdote qui le faisait toujours rire à 94 ans et qu’il racontait à son petit fils, mon père : sa femme avait caché le curé dans un tonneau vide pendant que les amis de François et lui-même voulaient lui faire passer un mauvais quart d’heure.
François Trichot fut assassiné à 94 ans par des complices de sa domestique arabe qui le gardait à la ferme. Mon père avait alors 6 ans et se souvenait de ce vieux monsieur à barbe blanche chez qui il allait jouer.

Une histoire de « Colons »
Prosper Léopold TRICHOT qu’on a toujours appelé Léopold a été élevé difficilement à cette époque à Sillègue. Mais au fil du temps, les relations amicales qui se sont tissées, les années de travail ont transformé la famille Trichot en véritables « colons ». Léopold se maria à 30 ans en 1886 avec une demoiselle CHAMBON Claire qui avait alors 19 ans. Ils eurent un fils François Léopold décédé à 20 mois le 5 octobre 1888 et un 2èmefils, mon père, Casimir Henri né le 13 décembre 1889. Son père avait 34 ans et sa maman 21. Elle décéda alors que mon père était âgé de 2 ans et elle fut enterrée à St Arnaud.

La vie de mon père dans une époque difficile…
Mon père que l’on appelait Henri a donc été élevé par son père Léopold et une tante (je crois une sœur aînée de mon grand-père puisque la propriété lui appartenait aussi). 
Léopold Trichot mourut le 4 novembre 1913 à Sillègue à l’âge de 58 ans, laissant son fils Henri et la tante héritiers de la propriété et du café.

Mon père Henri TRICHOT s’est marié en 1910 à Sillègue avec Alice Rosine VASQUEZ et a eut deux filles Henriette née en 1911 à Sillègue et Isabelle née le 13 février 1913 à Sillègue. Il partit à la guerre de 1914-1918 en laissant ses deux petites filles à sa tante. Il fut d’abord mobilisé à Monastir en Tunisie puis aux Dardanelle au 3èmerégiment de zouaves où il a été blessé à la tête (éclats d’obus – il lui en restait un petit bout dans le lobe de l’oreille droite).

Alors qu’il était en Orient de 1915-1917 puis en Algérie et au Maroc jusqu’au 13 mars 1919, sa tante avait vendu en viager la propriété et le café à un propriétaire de Sillègue. Je suppose qu’elle y était obligée puisque sans ressources, sans personne pour s’occuper de la ferme. La femme d’Henri et deux enfants à nourrir…
La tante décéda en 1917 et Alice Vasquez la jeune maman mourut de la grippe espagnole qui fit en 1918, des milliers de morts en France comme en Algérie.

A sa démobilisation en 1919, mon père Henri âgé alors de 30 ans, découvrit qu’il avait tout perdu : il n’avait plus d’épouse, plus de ferme et plus de café. Ses deux petites filles avaient été recueillies par des amis à St Arnaud, elles avaient 6 et 8 ans.

Il a intenté un procès pour essayer de récupérer ce qu’il considérait comme son bien. Il perdu le procès à Constantine, il le gagna à Alger et le perdit définitivement à Paris en dernier recours.
Il ne lui restait qu’à aller travailler chez les autres avec comme seul métier celui de cultivateur et de Maréchal Ferrand qu’il avait appris avec un de ses ouvriers et son Certificat.
Je pense que jusqu’en 1924  il a travaillé chez des amis de son père pendant que ses filles étaient en pension chez des amis.
En 1924, il rencontra à St Arnaud ma mère Lucie DUFRENE et l’épousa malgré l’opposition de la famille Dufrene. Il ne voulait pas d’un ouvrier.

Qui était Lucie DUFRENE ?
Son père Charles Raymond DUFRENE né le 8 avril 1850 à Vaison la Romaine de Dufrene Joseph 51 ans cultivateur et de Marie GELY son épouse de 37 ans.
A 20 ans, Charles tire un « mauvais numéro » qui le désigne pour faire son service militaire (7 ans à l’époque) à SEDAN et fait la guerre contre l’Allemagne, la perd et se retrouve à Paris après s’être évadé de Sedan à pieds. Après jugement, on l’expédie en 1871 en Algérie pour finir son service militaire où il se retrouve à surveiller et protéger les ouvriers qui construisent la ligne de chemin de fer « Alger – Constantine ».

La Corse arrive dans la famille Trichot
Aux environs de Constantine, se trouvait une ferme « St Marie » à Ain m’lila qui appartenait à Madame Marie POLI Corse d’origine et sœur ou belle-sœur des Tomazzoli.
François TOMAZZOLI 28 ans le 3 juin 1860 était propriétaire cultivateur à la VALLEE DE MEZZANA département d’Ajaccio avec son épouse Marie GIANNE. 
Tous deux sont décédés en 1873 en laissant deux fillettes. L’une ma grand-mère Marie Françoise TOMAZZOLI née le 3 juin 1860 à Mezzana et sa sœur Toussainte plus jeune de 2 ou 3 ans. Ce qui explique qu’elles étaient en Algérie recueillies par leur tante Marie POLI et vivaient avec elle à la ferme « St Marie » à Ain m’lila.

C’est en passant par là, que Charles DUFRENE a rencontré Françoise TOMAZZOLI après la fin de son service militaire. Il a dû avoir une place dans les chemins de fer algériens. Ils se sont mariés vers 1880 à la ferme « St Marie » car tous les enfants sont nés à Ain m’lila.
-      Marie Jeanne Joséphine née le 11/12/1884
-      Emile né en 1889 décédé en 1910 pendant son service militaire à Constantine
-      Jane née le 21/02/1890 décédée le 2/02/1951
-      Lucie née le 19/12/1895 décédée le 24/07/1976
-      Toussainte née le 7/10/1897 décédée en 1921
C’est après la naissance de Toussainte que Charles et Françoise ont eut leur ferme à BEHAGLE où tous ont passé leur jeunesse et se sont mariés.

Marie est devenue Madame QUEREUIL, eut un fils Emile né le 1/11/1913 à Behagle et décédé le 5/8/1977 en Espagne (électrocuté). Le père d’Emile est décédé quant à lui  en 1915 à Guelma.
Marie s’est remariée le 19/11/1929 à Sétif avec Louis DUTTO et c’est sous ce nom qu’on a tous connu « Tata Marie » décédée le 23/05/1983.

Jane a dû se marier en 1920 à Sétif avec William THIBAUDIER ingénieur et aviateur en 1914-1918. Un homme très intelligent, car il inventait beaucoup de choses notamment des machines agricoles. Mais pas assez riche pour protéger ses brevets qui lui ont été « volés » par des américains entre autres, celui de la moissonneuse lieuse.
En 1951, il était à la Foire de Paris pour présenter encore une invention mais cela n’a pas marché.
Jane et William ont eu trois enfants
-      Raoul né le 31/12/1921 à BOUIRA décédé le 28/12/1999
-      Christiane née le 25/5/1924 à DJIDJELLI
Paulette née le 5/08/1927 décédée le 8/02/2000

Ma mère Lucie…. le garçon manqué !
La troisième fille Lucie, ma mère a rencontré mon père en 1924 à St Arnaud en allant faire des achats avec son cabriolet à cheval. Des quatre filles, ma mère était le garçon manqué, pas question pour elle de broder ou jouer du piano comme ses sœurs. C’est elle qui allait à cheval pour surveiller les kames (c’est le nom arabe des ouvriers agricoles dans le Constantinois) dans les champs. Elle avait un fort  caractère et cela ne devait pas être tous les jours roses pour ces pauvres kames mais elle parlait arabe et avait toujours vécu à la ferme donc elle les connaissait bien.

Alors âgée de 29 ans et malgré l’opposition de sa mère et de ses sœurs, elle épousa mon père Henri TRICHOT le 6 décembre 1924 à BEHAGLE. Je ne sais pas si cela a été une bonne affaire pour tous les deux !!!!
Lui était « pauvre » et jaloux comme un tigre et elle, n’avait jamais appris à compter. 
Les deux filles Isabelle dite « Bébelle » vivait avec eux et Henriette était pensionnaire au collège. Je me rappelle que bébelle m’a dit qu’en 15 jours, Lucie avait dépensé la « paye » du mois d’Henri. Cela ne les a pas empêché de voir arriver 7 enfants très vite :
-      Huguette Claire Françoise née le 26/08/1926 (et oui c’est moi)
-      Charlette née le 22/12/1927 décédée le 16/08/1928
-      Paul Raymond né le 18/03/1929 décédé le 5/01/1986
-      Georges Maurice né le 12/05/1931 décédé le 30/08/1932
-      Simone née le 10/03/1933 décédée le 2/10/1934
-      Henri, Lucien, Fernand né le 16/03/1935
-      Guy, Louis, Marcel né le 9/12/1937
Ouf ! Il y en a quand même qui ont résisté aux grandes chaleurs pendant leur petite enfance.
Pour la vie d’Henri et Lucie, il faut remonter en 1924 au mariage. 
Mon père n’était pas bien vu ni accepté dans la famille DUFRENE. Surtout de Tante Marie veuve encore à l’époque, qui souhaitait que Lucie reste célibataire pour régler la problématique de la succession de l’héritage de ma grand-mère.  
Il s’éloigna donc pour trouver du travail loin de Behagle et de St Arnaud.

L’héritage
Lorsque ma grand-mère décéda le 14/10/1928 à Sétif et grâce à l’héritage que mes parents purent toucher, mon père pu louer une ferme où est né Paul dit « Paulo » aux falaises Oued Marsa.
Bébelle se souvenait de cette belle ferme avec beaucoup d’orangers et une grande maison. Il y avait aussi une automobile.

La crise de 1929….
Mais hélas, la chance n’était pas là, il y a eut le krach de Wall Street le 24/10/1929 aux Etats-Unis et il n’a pas fallut beaucoup de temps pour que les faillites et le chômage arrivent en France et en Algérie. Les récoltes n’ont pas été vendues en 1929 et 1930.
Henri a dû rendre la ferme, vendre l’auto et toute la petite famille est partie cette fois vers le Département d’Alger.

Il reprit son métier de Maréchal Ferrand chez « les pères Blancs » à Maison Carrée où est né et décédé Georges.
J’entends encore le bruit du marteau sur l’enclume et je sens l’odeur de la corne brûlée des sabots des chevaux, j’avais alors 6 ans.

Le départ pour BOUFARIK
Après la mort de Georgeot, nous sommes partis à Boufarik en 1932, dans une ferme où mon père était surveillant des ouvriers arabes.
Puis le chômage était tellement important que mon père cherchait du travail sans cesse. Je me souviens qu’il partait tôt le matin à vélo chercher du travail dans les fermes des environs et après des kilomètres parcourus, il revenait sans rien les larmes dans les yeux. Nous vivions alors dans un appartement minable de Boufarik.

Mais il y eut le miracle de son certificat d’études et sa réussite à son examen d’entrée dans la Police Municipale de Boufarik. Mon père eut un logement de fonction et toute la famille s’installa dans l’ancienne Ecole Supérieure (qui est devenue par la suite une salle de gymnastique).

Pendant ce temps, notre sœur Henriette s’était mariée à Alger avec Monsieur EXIGA en 1930. Bébelle alla habiter avec eux et gardait leur petit garçon Claude né en 1931.
Elles venaient nous voir à Boufarik (30km d’Alger) et leurs venues étaient toujours une joie pour Paulo et moi car elles nous gâtaient. 

En octobre 1934, notre petite sœur Simone mourut à l’âge de 20 mois j’avais alors 8 ans et nous furent bien sûr tous peinés. Notre chagrin fut en parti dissipé par l’arrivée de Ritou quelques mois plus tard (un gros père comme Luc Bébé).
Mais en 1936, Henriette notre sœur alors âgée de 25 ans mourut en 3 jours d’une méningite, laissant son petit garçon de 5 ans.

Le Front Populaire de 1936
Mon père devenait fou de chagrin de tant de pertes. 1936, c’était le front populaire, des grèves un peu partout et mon père, de par son éducation, n’était pas avec les idées du « front populaire ». Il commença à avoir des ennuis avec la Mairie de Boufarik et je crois que c’est à ce moment là qu’il devenu un peu moins sobre. 
Cette situation amena des disputes à la maison car ma mère qui avait beaucoup trop de travail à la maison n’était pas diplomate avec lui. 

Bébelle était revenue vivre avec nous après la mort de sa sœur Henriette. Elle partait à Alger très souvent chez sa tante Aurélie (la sœur de sa mère). Elle rencontra son cousin Louis Vasquez qui était boulanger à Belcourt un quartier d’Alger où à vécu Albert CAMUS.  J’ai connu ses amis cafetiers RIVIECCO qu’il cite dans son dernier livre inachevé « le premier homme ».

La Boulangerie
Pendant l’année 1937 à 1938, une période faste car Louis et Bébelle venaient souvent nous voir avec leur auto-camionette. Ils se sont mariés le 31 décembre 1937 à Alger, Guy-Guy était arrivé le 9 décembre. Louis était son parrain et moi sa marraine.
Ils arrivaient souvent le soir après avoir fermé la boulangerie avec une valise remplie de gâteaux (mounas) invendues mais qui faisaient notre bonheur à Paulo et à moi.

Hélas, au début de l’année 1939, Louis a été hospitalisé à Alger. Bébelle qui attendait Alain est venue à la maison en Mars car elle ne pouvait plus s’occuper de la boulangerie et des ouvriers seule et enceinte.
Mon père faisait la navette entre Boufarik et l’hôpital et Louis est mort le 14 mai 1939 et Alain est né le 21 ! Pendant quelques temps, mon père n’a rien dit à Bébelle trop faible. Je me suis beaucoup occupée d’Alain à l’âge de 13 ans, il était comme mon « premier » enfant. Bébelle a été obligée de vendre la boulangerie et de chercher du travail à Alger. La guerre était déclarée en septembre 1939 et elle a trouvé une place d’ouvrière à Maison Carrée à l’A.I.A. – l’Armée de l’Air – et Alain est resté à la maison avec nous. Je n’ai jamais vu une femme autant travailler qu’à cette époque. Bien sûr ma mère travaillait, elle lavait le linge au bassin de la buanderie avec ses enfants à ses côtés : Ritou assis sur un tapis car il était gentil. Guy-guy un peu braillard il faut bien le dire, assis sur un de ses genoux, le pied posé sur un tabouret.
Je ne pouvais soulager ma mère qu’à mon retour de l’école. 
Quant à mon père, il n’arrangeait pas les choses : il lui faisait des scènes de jalousie car à la salle de gymnastique venaient des jeunes gens filles et garçons pour jouer au Basket.
Avec la déclaration de la guerre, il a fallut quitter cet endroit qui faisait notre bonheur – surtout l’été où nous profitions des agrées et des douches.

Quitter l’école pour le travail
On s’est retrouvé fin 39 au 21, rue Borely la Sapie à Boufarik – la maison que les plus grands d’entre vous ont connue.
Nous changions de maison mais les disputes à la maison, elles, étaient toujours là.
Paulo et moi avions beaucoup de mal à supporter cela et nous avons eu des années difficiles. Paulo a quitté l’école à 13 ans pour être apprenti chez un mécanicien. Il avait encore des pantalons courts car avec la guerre on ne trouvait pas de vêtements ni de souliers. Son premier pantalon long de travail, je lui ai fait dans un drap du trousseau de ma mère en grosse toile teintée bleu marine. 
En 1942, c’était à mon tour de quitter l’école et de trouver un travail. J’ai commencé comme téléphoniste dans un Etablissement Militaire.
En 1943, Paulo est rentré aussi dans l’ERGM* et ne l’a plus quitté. Il a gravit les échelons qui l’ont menés d’apprenti à Chef d’Equipe. * Etablissement des Réserves Générales du Matériel (militaire).
En 1946, mon père est retourné à St Arnaud pour la 1èreet dernière fois car il voulait revoir sa maison, son village et ses morts au cimetière. Il est revenu malade et après bien des scènes – qui nous faisaient du mal à Paulo et à moi – il est mort le 21 février 1947 d’une dysenterie amibienne mais surtout rongé par la boisson.

J’avais 20 ans à son enterrement. Nous étions cinq : Paulo et moi, Raoul et Paulette, et Georges Maslard un jeune homme et ami de Raoul. Bien sûr il y avait beaucoup de monde de Boufarik qui nous suivait mais maman et Bébelle étaient restées à la maison avec les enfants Ritou 12 ans et Guy-guy 9 ans, Alain 7 ans.
Heureusement que Paulo 18 ans et moi 21 ans travaillions à l’ERGM. Alors on s’est organisé avec maman. Elle travaillait elle aussi toujours autant mais sans être disputée. Les garçons ont fait leur communion Ritou en 47 et Guy-Guy en 49.
Notre promenade du dimanche était le cimetière. Paulo et moi avions pris conscience quelques temps après que la vie avait été trop dure pour notre père.

La Terrible maladie de Paulo
Deux années tranquilles se sont passées… mais le 14 juillet 1949 Paulo est tombé gravement malade. Un jour avec ses copains, il part en vélo à la mer à Douaouda Marine (15 Km) par une grosse chaleur, il boit trop froid et lorsqu’il revient le soir, il n’est pas bien. Le lendemain une pleurésie s’était déclarée. A cette époque, c’est à peine que la pénicilline faisait son apparition. Cela allait de plus en plus mal avec des maux de tête terribles et il a dû être hospitalisé à Elkettar, l’hôpital d’Alger où l’on soignait les méningites tuberculeuses. Le premier français à être sauvé de cette maladie grâce à la streptomycine était soigné dans cet hôpital.

Il n’y avait plus qu’un seul salaire, le mien, puisque Paulo était à l’hôpital. J’ai donc dû trouver un travail supplémentaire pour nourrir la famille, acheter les médicaments dont Paulo avait besoin pour sa guérison et pour aller le voir. Maman y allait le jeudi après-midi et moi le dimanche après-midi.
J’ai donc travaillé à l’emballage des oranges le soir de 20H00 à 24H00, le samedi toute la journée et le dimanche matin de 8H00 à 12H00. Je prenais le train de 13H00 pour Alger pour voir Paulo.
En novembre 49, j’ai pris mon congé payé de l’établissement et j’ai travaillé tout le mois aux oranges pour doubler mon salaire. Paulo est revenu à la maison après 3 mois d’hôpital très affaibli et il a été en congé maladie jusqu’en septembre 1950.
J’ai donc pris mes congés en 1950 mais comme les temps étaient difficiles, je suis retournée aux oranges où j’ai beaucoup travaillé.
Mais j’ai reçu beaucoup d’amour de la part de mes frères, ma sœur et de ma mère. Tous mes amis ont été gentils avec moi, et dans mes relations de travail le Colonel de l’Etablissement aussi, qui m’a permis de travailler, alors que je n’y avais pas le droit étant fonctionnaire.
Certains de mes amis m’ont aidé en me faisant coudre le soir des robes avec la machine à coudre de Madame LLINARES. 

Au Cinéma l’Empire
A la plus grande joie de mes petits frères, j’ai trouvé une place de caissière au Cinéma « Empire » tout près de la maison. A la fin de ma journée, je quittais le bureau et j’allais travailler de 20H à 22H30 au Cinéma la semaine. Le samedi après-midi et le soir.Le dimanche matin et le soir.
Un de mes frères m’accompagnait à tour de rôle car je ne voulais pas me retrouver seule dans la rue si tard. A leur plus grande joie, puisqu’il pouvait ainsi voir la 1èrepartie du film. Le mercredi ou le samedi soir, ils pouvaient voir avec moi le grand film !
Et c’est aussi au Cinéma que j’ai fait la connaissance de Guy qui allait devenir mon mari.

Quand Paulo a repris son travail après avoir passé un mois en maison de repos à Nice, tout est redevenu beaucoup mieux. De plus, Ritou avait 15 ans et il était devenu apprenti menuisier. Guy-Guy avait 12 ½ ans et il était dans son année du Certificat et j’espérais le faire aller au lycée car il travaillait bien.

1950
Voilà un siècle est passé et les « fils de colons » que nous étions étaient plus pauvres que certains arabes mais ne devaient rien à personne et travaillaient pour faire vivre leur famille.

Chacun s’est marié à Boufarik Guy et moi en décembre 1951 et nos premiers enfants sont nés :
Jean-Paul, né le 28/12/1952 à Blida
Claude, née le 15/07/1954  à Blida et décédée le 16/02/2001 à Houx
Pierre-Guy, né le 19/10/1957  à Laghouat

Paulo et Ginette en décembre 1953
Gérard, né le 3/02/1955 à Blida
Marie-Claire, né le 3/05/1956 à Blida
Annie Paule, né le 3/06/1959 à Blida
Bernard, né le 19/04/1963  à Châlons-Sur-Marne
Luc, né le 21/09/1965 Châlons-Sur-Marne 

Guy et Josette mariés à Bobigny
Franck, né le 31/12/1964 à Paris

1962, le Départ
12 ans après, nous quittions pour  toujours ce beau pays où il n’y avait plus de drapeau français en laissant derrière nous notre histoire de colons.

Nous avons essayé de faire comprendre aux métropolitains que nous étions deux fois français, une fois à la naissance et une 2èmefois parce que nous avions choisi de tout laisser pour revenir chez nous en France le pays de nos grands-parents.


Maurepas, mon port d’attache
Depuis, plus de 40 ans ont passé. Quelques années à Bobigny pour notre démarrage dans la métropole et depuis 36 ans à Maurepas où nous nous sommes installés dans une maison en 1968. Cette ville est devenue mon véritable port d’attache. 


La Carte de France des Trichot
La seule différence c’est que là-bas, la famille était rassemblée sur 30 Km. Ici, nous formons une toile d’araignée sur toute la France :
-      Maurepas (IdF) pour nous, Pierre-Guy et Anne-Marie et les enfants
-      Chalons en Champagne pour Ginette et Théo
-      Grenoble pour Gérard et Véronique et les enfants
-      Reims pour Marie-Claire et ses enfants
-      Valence pour Annie-Paule et ses garçons 
-      Paris pour Bernard et Christelle et leur fille
-      Gallardon pour Luc et Isabelle et les garçons
-      Cannes pour Ritou
-      St Mard (IdF) pour Guy-Guy et Pauline
-      Bordeaux pour Alain et Ghislaine
-      Venable en Normandie pour Franck et Isabelle et leurs filles
-      Houx pour René (Eure & Loir)
-      Jouy pour Eric et Eléonore (Eure & Loir)
-      Remirement dans les Vosges pour Bruno et Emilie et leurs jumeaux
-      Et celui qui est le plus loin de tous, Jean-Paul mon fils aîné à l’île de la Réunion à plus de 15.000 Km de nous !
-      Et enfin les cousins Thibaudier dans le Jura, Perpignan, Toulouse, 
      St Suzanne et Montpellier.






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